Michèle Havy avait 13 ans en 1944. Elle raconte la vie dans les ruines à Caen pendant l'été 1944.

 

La maison familiale n'a plus de fenêtres et a reçu deux obus. Malgré tout, la famille réintègre la bâtisse. « On a fait comme on a pu, on a mis du papier aux fenêtres. Le toit était très abîmé. Le premier hiver, quand il pleuvait, on ouvrait les parapluies sur le lit », se rappelle Michèle Havy.

Mais le logement n'était pas le seul souci des civils. Dans une ville dévastée, trouver de quoi se nourrir était devenu bien difficile. « Il ne faut pas croire que dès la Libération, tout est rentré dans l'ordre. »

Ainsi, les tickets de rationnement, bien connus pendant l'Occupation, sont encore d'actualité. « Mais ils n'étaient pas suffisants. Viande, lait et pain étaient toujours rationnés. »

Face à ces difficultés, le marché noir perdure. « Vous trouviez ce que vous vouliez. Il était assez développé. Mais pour cela, il fallait avoir de l'argent. »

Contraste saisissant avec les étals des commerces. « Dans les boutiques, il n'y avait toujours rien. Je me rappelle d'une fois où je suis rentrée à la maison. Maman pleurait car elle avait juste trouvé un os chez le boucher. Elle avait fait un ragoût avec uniquement des pommes de terre et l'os. Cela n'a pas toujours été facile. »

Dans les campagnes, les difficultés sont moindres. Malgré tout, « les fermes avaient beaucoup souffert autour de Caen ». De nombreux champs labourés par les bombes et truffés de mines, n'étaient plus cultivables.

Lent retour à la normale

Pommes de terre, topinambours ou encore bettes étaient alors la base de l'alimentation. « On n'avait pas de café non plus. On utilisait donc de l'orge... C'était très mauvais ! »

Pour s'habiller, ce n'était pas simple non plus. « L'ennui pour nous, les jeunes, c'est qu'on grandissait. Ma mère me faisait des manteaux dans ses vêtements à elle, quand ils étaient usés. »

Le retour à la normale se fait petit à petit, « mais les habitants manquaient de tout ». 

A la sortie de la guerre, la mère de Michèle décide d'ouvrir un commerce de bazar et de maroquinerie. « Je me rappelle qu'un jour, ma maman avait fait venir de Paris une centaine de valises. Elle les a vendues en une journée. Les gens les achetaient pour ranger leurs affaires, pour stocker, en attendant d'avoir autre chose. Ils n'avaient plus rien, plus d'armoires. »

Il faudra ainsi plusieurs années pour que la ville renaisse de ses cendres, et pour que ses habitants retrouvent enfin un quotidien apaisé.

Source de ce témoignage

RETOUR LISTE DES TEMOIGNAGES