Témoignage paru dans ce livre page 333
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Robert Marie, parti de Caen avec ses parents le 13 juillet 1944, se retrouve à Occagnes, près d'Argentan (Orne), une semaine plus tard.
Toutes
les portes se ferment devant nous.
Des trombes d'eau
se déversent dans les
rues; nous sommes les seuls à patauger
dans l'eau, sous
l'eau, transis. Ma mère, arrivée une demi-heure
avant nous, dans une
des premières charrettes, nous attendait
appuyée contre un mur.
Elle est en larmes; en
furie contre
tous ces habitants,
cultivateurs compris, qui laissent tous les
réfugiés dans la rue,
sous l'orage.
À
l'instigation de deux ou
trois hommes décidés,
nous forçons un paysan à nous laisser
entrer dans sa ferme.
il nous accueille la fourche à la main
et ne nous laisse pas
aller plus loin qu'un simple hangar sous
lequel les rafales
continuent de nous inonder.
C'est intenable.
Ma mère se décide à
aller voir son collègue instituteur, qui,
bien que réticent,
finit par nous enseigner la maison d'une
vieille dame seule qui
consent à nous louer (fort cher
!)
une
grande pièce où nous
allons nous sécher et passer la nuit.
Nous
quittons nos vêtements
trempés et nous nous serrons devant
la grande cheminée où
flambe le fagot que notre logeuse nous
a vendu (fort cher !).