Navires allemands Vorpostenboote (patrouilleurs) échoués dans le canal
1- Le navire allemand échoué dans le canal, devant le 33-35 avenue de Tourville, entre le Bassin Saint Pierre et le Nouveau Bassin.
Voir ici la localisation
Sur la photo aérienne de Caen Est prise le 15 juin 1944, le bateau est visible, remarquez une passerelle en bois à droite.
Photo de meilleure qualité, l'échouage aurait eu lieu le 12 juin selon cette source, date infirmée selon d'autres sources. En fait suite aux bombardements et (ou) sabotage allemand de l'écluse du Bassin Saint Pierre le canal s'est vidé dans l'Orne, l'écluse d'Ouistreham restée en état est sous contrôle anglais depuis le 6 juin.
Source. Aquarelle de Stephen Bone : German "Flak" ship in the canal.
Photo parue dans avec cette légende: V.P. Boat 206, 10 july 1944. De nos jours.
Voir ici un VP dans le Bassin Saint Pierre
Sur cette photo aérienne le Nord est à 5 H, date automne 1944, le VP 206 à droite.
Source page 27 de . A gauche le navire échoué quai de Tourville en face du port charbonnier.
Ce navire avait été miné par les Allemands pour sauter lors de son renflouage et ainsi provoquer le blocage du canal. C'est le célèbre homme grenouille britannique: Lionel Crabb , en poste à Arromanches, qui plongea sur l'épave du canal pour désamorcer les mines.
Il s'agit de l'ex chalutier "Otto Bröhan" construit en 1937-1938, échoué, le 6 juin 1944 (variable selon les sources), dans le canal de Caen à la mer en face du quai charbonnier. C'est un navire de 1100 tonnes et de 55.65 m de long. Il appartient à la 2. Vorpostenflottille , PC à Saint-Malo, aurait été dynamité le 12 juin donc sabordé par les Allemands. Renfloué et remis en état par les Chantiers Navals de Blainville et baptisé "I.H. Nicolas" (Ingénieur Hydrographe Nicolas)
Source. Deux photos de l'Ingénieur Hydrographe Nicolas.
2- Le navire allemand échoué dans le canal à l'embranchement du chantier de construction de Blainville.
Photos extraites de ce livre .
Sur cette page la photo d'un autre V.P. le 212.
Charles Wheeler qui le visite le 12 juillet 1944 est un membre du 30 AU (30th Assault Unit) . Cette unité était chargée de visiter toutes les épaves et les E.M. allemands pour trouver des infos stratégiques.
Le V.P. Boot 212 échoué (par manque d'eau) près de Blainville sur Orne. (Coll. P. Dalzel-Job). Source: page 405 de ce livre . Le V.P. 212 patrouilleur allemand photographié de l'autre rive.
Le VP 212 est l'ex chalutier de 950 tonnes et 50,63 m de long "Friedrich Busse" lancé en 1934, appartenant à la 2. Vorpostenflottille , PC à Saint-Malo coulé le 6 ou le 12 juin 1944 (selon les sources) et échoué dans l'embranchement du chantier naval de Blainville.
Selon ce livre, en juin 1944, le VP 212 était devenu le chasseur de sous-marins UJ 1401 de la 14. U-Bootsjagdflottille , PC à Lorient, mais il s'agirait d'une confusion avec le Friz Busse, aussi nous ne retenons pas cette affectation.
Localisation à 3.2 km en amont de Pegasus bridge. De nos jours l'usine Renault Trucks.
Le chantier naval de Blainville sur Orne sur le canal.
Renfloué (voie d’eau au-dessus ligne de flottaison) et transformé en navire de sauvetage "King Hal", puis en chalutier danois "Torhallur TN 79"
Le Torhallur ex Friedrich Busse.
Que c'est-il passé ?
Très difficile à dire tellement les sources sont contradictoires, voyons cela.
Tout d'abord les documents sources: à défaut de l'After Action Report voici le war diary du 2nd Bn Oxfordshire and Buckinghamshire Light Infantry, la seule mention est celle-ci:
" Soon after 1st light a Gun Boat moved up the Canal from the sea and shot HQ 7 Para Bn. another well aimed PIAT bomb put this out of action."
Soit: Peu après les premières lueurs du jour une canonnière remonta le Canal depuis la mer et tira sur le QG du 7th Para Bn, une autre roquette de Piat bien ajustée la mit hors d'action.
"Further attacks were launched on the
battalion position during the afternoon. At one period, as a novelty, two
gun boats came up the CANAL. Fire was held until they reached the bridge when
one of them was put out of action by a PIAT fired by Howard's force from the
bridge area. The second one turned round and made off quickly while the first
one opened fire with its gun (which was remote controlled) and shot up my HQ
area. There were several lucky escapes and only one slight casualty. The crew of
the boat were taken prisoner.
The same boats, or similar ones, had been shooting up the battle outpost at the
battery position 105765 (Lieut Parrish). This outpost found that the position
was, as thought, abandoned and so they occupied it themselves and remained there
all day without incident other than the trouble with the gun boat. This trouble
cost the outpost one killed and one wounded."
Soit:
D’autres attaques furent lancées durant l’après-midi. A un moment, comme une nouveauté, deux canonnières remontèrent le canal. L’ordre de ne pas tirer fut maintenu jusqu’à ce qu’elles atteignent le pont et c’est alors que l’une d’elles fut immobilisée par le tir d’un PIAT provenant du groupe d’Howard (Major John Howard) en position autour du pont. La deuxième fit demi-tour et prit rapidement la fuite alors que la première ouvrait le feu avec son canon (qui était télécommandé sic !) et prit la zone de mon PC pour cible. Il y eut plusieurs échappées chanceuses et seulement un blessé léger. L’équipage du navire fut fait prisonnier.
Les mêmes navires ou d’autres similaires avaient tiré sur l’avant poste de combat de la batterie positionnée en 105765 (Lt Parrish). Les hommes de l’avant-poste du bataillon constatèrent que la position, comme prévu, était abandonnée, et l’occupèrent et restèrent là toute la journée sans incident autre que celui de la canonnière. Cet incident coûta à l’avant-poste un tué et un blessé.
Le point 105765 sur carte 7F/2 et après conversion, à 1.9 km en aval du pont de Bénouville.
Ensuite nous avons les écrits suivants:
"Vers
trois heures de l'après-midi, (le 6 juin)
un chaland chargé d'Allemands en armes descend le canal, venant de Caen.
L'équipe des Oxf and Bucks qui sert la pièce de 20 Flak/Pak ouvre le feu à bonne
distance. Le premier obus manque sa cible et le navire vire sur place pour
repartir vers l'amont. Un second coup de canon, durement encaissé sur l'arrière,
provoque quelque confusion parmi les passagers. Une fumée noire se dégage du
bâtiment qui remonte le canal vers Caen."
L'équipe des Oxf [Ox] and Bucks
est
la D Company du
2nd Bn Oxfordshire and Buckinghamshire Light Infantry du Major
John Howard
à
Pegasus
bridge (le pont de Bénouville)
2-
Autre source dans ce livre
page 50:
"«
La directrice, Madame Vion , raconta plus tard aux Britannique qu'un officier,
un sergent et un soldat allemands avaient fait irruption malgré ses
protestations véhémentes, qu'ils s'étaient rués dans les escaliers et qu'un de
leurs canons antichars avait, par méprise, ouvert le feu sur le bâtiment. En
réalité Höller, qui ne soupçonnait pas se trouver dans un hôpital, avait éprouvé
une « désagréable surprise » en entrant dans une des salles. Alors qu'il était
encore dans l'escalier, un canon allemand avait tiré sur lui, mais ce n'était
naturellement pas un des siens. Le coup venait d'un bateau allemand, qui
remontait le canal en direction de Caen pour échapper au feu des Britanniques.
Il y avait
deux de ces bateaux qui fuyaient devant le débarquement par mer,
alors à ses débuts. Ils atteignirent le pont juste comme le général Gale, chef
de la 6e Division aéroportée, traversait celui-ci à pied. L'un fut mis hors de
combat et s'échoua à la berge où des parachutistes s'en emparèrent; l'autre
passa en amont, ripostant avec une pièce de 20 mm sur les paras, le lieutenant
Höller et la directrice. « Bien entendu, dit Höller, nous ne pouvions lui
répondre, mais il disparut bientôt sans nous avoir causé de dommage ».
Madame Vion
est la directrice d'une maternité dans le
château de Bénouville,
le Leutnant Hans Höller Zugführer du I. Zug s.8.Kp II./Panzer-Grenadier-Regiment 192 de la 21. Panzer Division . Voici ce qu'il en dit dans son livre :
Dès le matin, peu après le commencement du débarquement anglais sur la côte, deux patrouilleurs de la Kriegsmarine ont quitté Caen. Ils voulaient gagner Ouistreham en empruntant le canal, pour « sonder le terrain », vers le Nord. Peu avant d'atteindre le pont Pegasus, ils ont été pris à partie par les parachutistes anglais au moyen d'armes antichars de type PIAT Projector, Infantry, Anti Tank, si bien que l'un des bateaux a échoué et son équipage a été immédiatement fait prisonnier. Le second patrouilleur a pu s'enfuir et, dans l'après-midi, au moment même où nous nous déplacions en direction du château, il a tenté de nouveau une reconnaissance vers le pont basculant. Probablement aussi pour voir ce qu'il en était de son " jumeau" et de son équipage. Encore une fois, il a été pris sous le feu défensif des parachutistes au pont. Il s'est donc replié sur Caen, or le feu de sa 2-cm-Flak a presque failli nous coûter la vie.
Hans Höller questionné en décembre 2014 ne garde pas un bon souvenir de ces tirs de la K.M. .
La maternité où était le Leutnant Hans Höller est à 840 m en amont du pont. LOCALISATION. Le pont Pegasus bridge depuis le premier étage du château de Bénouville. Photo Paul Charrier.
le Major-General Richard N. Gale est le commandant de la 6th Airborne .
3- Autre source dans ce livre page 84:
Höller monte dans la maternité et observe alors les hardis marins de la Kriegsmarine descendre le canal depuis Caen vers la mer:
L'équipage nous voit à travers les grandes fenêtres dans la cage d'escalier courir vers le haut et nous canonne avec des pièces de 20 mm, pensant que nous sommes des Tommies. L'escalier a l'air désert, personne n'est atteint. L'apparition est bientôt passée et nous sommes à l'étage supérieur. Ce navire, avec un second, qui avait entrepris une attaque contre le pont du canal occupé par l'ennemi, est repoussé. Le second navire, touché par le tir adverse, coule. L'équipage est fait prisonnier".
4-
Autre source,
dans un vieil Historica:
"Vers
10 heures les généraux de brigade(sic
!) Gale
et Kindersley (en béret amarante, battle-dress et stick sous le
bras) arpentent le pont de Bénouville au moment où deux petits navires de la Kriegsmarine
, qui ont fui Ouistreham, tentent de rallier le bassin de Caen. Les
paras les laissent s'approcher et les piègent au pont où leurs manoeuvres
d'évasion leurs sont fatales , sous les coups des
PIAT antichars.
Un équipage se rend alors que l'autre, machine intacte, parvient sous les tirs
des FM, à s'échapper vers
Ouistreham
où il sera capturé quelques heures plus par le
n°4
Commando."
Le Brigadier The Honourable Hugh Kenyon Molesworth Kindersley est le commandant de la 6th Airlanding Brigade (6th Airborne)
5- Autre source: ce
site
Avant la lever du jour, trois navires allemands quittent le port
d'Ouistreham pour gagner Caen. Ces anciens chalutiers de la Baltique transformés
en garde-côtes étaient armés d'une pièce d'artillerie, d'un canon anti-aérien et
de mitrailleuses. Parvenus à quelques encablures du pont de Bénouville, ils
demandèrent l'ouverture ; ordre fut donné au pontier de le lever, mais seulement
à moitié. Sans méfiance les trois navires s'avancèrent, ignorant que les hommes
des forces aéroportées du Capitaine (sic !) D. (re-sic !)
Howard
étaient déjà maîtres du pont. Les Anglais purent mettre en
batterie une mitrailleuse lourde et ouvrirent le feu, réussissant à couler les
deux premiers bateaux ; le troisième put faire demi-tour et alla mouiller au
Maresquier ; son équipage se réfugia dans la carrière Mercier et fut fait
prisonnier le lendemain. Une quatrième vedette fut coulée par l'artillerie dans
la baie de l'Orne.
Le Maresquier à 2 km en aval de Pegasus bridge.
LOCALISATION
6- Autre source: ce site.
A l'aube, alors que plusieurs parachutistes britanniques s'étant perdus dans le secteur ont rallié la position d'Howard , une canonnière allemande fuyant Ouistreham pour rejoindre Caen apparaît : presque sans hésitation, les Britanniques font lever le pont et le bâtiment de guerre passe avant d'être pris à partie par les parachutistes : il s'échoue sur la rive quelques centaines de mètres plus loin.
7- Dans ce livre :
Peu après le départ de Gale , deux canonnières sont signalées remontant le canal vers Caen. Ces vedettes possèdent des mitrailleuses lourdes et un canon de 20. Face à un tel arsenal, cette fois encore, les Bren et PIAT se sentent bien légers d'autant qu'il ne reste qu'un PIAT avec un unique projectile. Le caporal Godbold ( Corporal Charles Henry Godbold) remplace Thornton (Sergeant Charles Thornton). Il s'embusque sur la rive est tandis que les paras se dissimulent dans les herbes de l'autre rive.
Les deux bâtiments naviguent à moyenne vitesse. Les officiers sur les ponts observent les berges aux jumelles. Savent-ils que le pont est tenu ? Certainement.
Rapidement Howard monte un piège. Il fait chercher le pontier résidant dans une maisonnette voisine. A l'approche de la flottille, le machiniste commence à lever le pont comme pour dégager le passage. Le mécanisme s'enclenche dans un grincement de ferraille. La canonnière de tête se sent en confiance. Tout s'annonce normal. Elle ralentit pour franchir le goulet.
Godbold retient son souffle. La première embarcation défile lentement devant lui. Le Britannique actionne son arme. La roquette percute la timonerie. Les Bren aussitôt croisent leurs tirs. Incapable de manceuvrer, la canonnière heurte la rive mitraillée à profusion. Les marins crient « Kamerad, Kamerad ! ». Après un char, le PIAT a une vedette à son actif. L'autre embarcation, plus en retrait, n'insiste pas. Elle bat en retraite pour regagner Ouistreham. Son équipage débarqué se terrera une dizaine de jour avant de se constituer prisonnier.
8- Autre source dans ce livre Pegasus bridge: June 6, 1944 de Stephen E. Ambrose aux pages 154 et 155:
Au moment où ils entrèrent dans le Quartier Général de Pine
Coffin (Lt.
Colonel George Pine-Coffin
, commandant du
7th Bn.
Parachute
Regiment)
deux canonnières apparurent soudain sur le canal.
Elles venaient du petit port de Ouistreham qui avait été pris d'assaut par des
éléments de la Brigade Commando de
Lord Lovat
(Brigadier
General Lord Lovat, commandant de la
1st Special Service Brigade)
. Il était évident que les canonnières savaient que les ponts
étaient entre les mains de leurs ennemis, car elles avançaient à une vitesse
modérée, tirant sur le pont avec son canon de 20 mm. Parr
(Private
Wally Parr)
ne pouvait pas leur
rendre la pareille avec son canon antichar parce que le pont et son tablier
obstruaient son champ de tir. Le caporal Godbolt
qui commandait la section n° 2
était sur la rive avec son Piat.
Howard
ordonna à ses hommes de ne pas tirer avant que la première
canonnière ne soit à la portée de l'arme de Godbolt. Mais, les hommes du 7e Para
en poste de l'autre côté commencèrent à tirer et Godbolt fit feu également,
visant à portée maximum et à sa grande surprise, il vit la bombe éclater à
l'intérieur de la timonerie. La canonnière tourna brusquement en travers du
canal, l'avant immergé dans la berge du côté des paras et l'arrière coincé
contre la rive où se trouvait la compagnie D.
Des Allemands sautèrent en courant de l'arrière du bateau et les mains en l'air
crièrent: Kamerad ! Kamerad !
Le capitaine, étourdi par le choc, mais méprisant fut sorti du bateau par la
force. Howard se souvient de lui comme d'un jeune Nazi de 18 à 19 ans, très
grand et parlant très bien l'anglais.
Et c'est dans cette langue qu'il déclamait qu'il était absolument stupide de
notre part d'essayer d'envahir le Continent et que dès que son Führer serait
averti de la situation, il aurait vite fait de nous rejeter à la mer; et cela
parmi d'autres remarques des plus insultantes. Je parvins à grande difficulté à
empêcher mes gars de saisir ce « salaud » et de le réduire en miettes.
Howard savait que le service de renseignement voudrait voir cet officier
immédiatement, aussi somma-t-il qu'il fût emmené à pied jusqu'au camp de
prisonniers de guerre à
Ranville.
Il fallut quatre hommes pour l'emmener de force tant il se montrait agressif et
continuait à vociférer des injures de toutes sortes.
Les sapeurs envahirent immédiatement le bateau pour en examiner l'équipement et
chercher des munitions et des armes.
L'un d'entre eux trouva une bouteille de cognac qu'il glissa immédiatement sous
sa veste de combat. Son commandant, Jock Neilson (Captain
Neilson, 249th Field Company), remarqua cette bosse insolite
et lui dit: « Et dit donc qu'est-ce
que tu as là ? » Le sapeur lui montra la bouteille de cognac, Neilson la saisit
immédiatement en disant : « Tu es
trop jeune pour ça ! ». Le sapeur se
plaignit: « Je ne bus jamais une seule goutte de ce sacré cognac. »
Cela faisait deux fois maintenant que la Compagnie D s'était servie du Piat tant
calomnié. La première fois l'arme avait détruit un tank et obligé l'autre à
décamper. La deuxième fois, le coup
avait immobilisé une canonnière et forcé l'autre à faire demi-tour et à
s'enfuir. La Compagnie D avait donc maintenant le contrôle des deux ponts, du
terrain qui les séparait et d'une
canonnière.
9-
Autre source dans ce
livre
aux pages
142,143, 144, 145 et 146.
Howard
scrutait le ciel : le danger vint de la mer.
Il devait être 5 h 20, peut-être 5 h 30 lorsque trois canonnières battant
pavillon allemand
se
présentèrent sur le canal, venant de Ouistreham.
Était-ce la contre-attaque? Venaient-elles pour le pont, ou se repliaient-elles?
Comment savoir?
A cette heure-là, en principe, la brigade de
lord Lovat
était en pleine opération de débarquement: ce qui pouvait
expliquer le mouvement des trois bâtiments.
Mais leur lenteur, leur prudence inquiétaient Howard.
Manifestement les canonnières observaient les rives et étaient prêtes à
intervenir de toute leur puissance de feu.
Elles étaient aussi dangereuses que le Panzer de tout à l'heure, aussi
dangereuse que pouvait l'être la
Luftwaffe
.
En un éclair, ce fut l'alerte maximum.
Encore que leur lenteur, si elle était une menace certaine, donnait à Howard le
temps de s'organiser.
Il fit le tour de ses possibilités. Ce n'était évidemment pas la fête. C'est
vrai qu'on avait bien eu raison d'un char de 38 tonnes, mais il restait en tout
et pour tout une roquette pour trois
bâtiments de guerre, équipés chacun de mitrailleuses lourdes et d'un canon de
20. C'est des trois canons qu'il fallait se méfier, car ils avaient une portée
très supérieure à celle des Brens et
du Piat. Howard demanda à Parr et à Gardner (Private
Gardner)
s'ils seraient en mesure de
manœuvrer le canon allemand. Ils ne se sentaient pas très à l'aise.
- De toute façon, il est du mauvais côté. Le tablier serait dans la ligne de
tir. A la rigueur, on pourra intervenir si les navires franchissent le pont,
mais sans doute que cela n'en vaudra
plus la peine... Dommage qu'on ait détruit la mitrailleuse lourde: elle, se
trouvait du bon côté ...
- Taisez-vous donc, Parr, vous parlez trop, lui fit remarquer Howard.
- C'était pour vous être agréable, Major ...
Parr ne se départissait jamais de son humour, même au moment des plus fortes
tensions. Au fond, Howard savait apprécier, sans le laisser paraître. Il savait
qu'il pouvait compter sur l'amitié de ses hommes.
Il respira profondément, comme pour retrouver son calme, et son efficacité de
décision.
Les trois bâtiments approchaient, de plus en plus lentement, tout en laissant
une grande distance entre eux.
Howard sentait leur manœuvre d'attaque: c'est là qu'il faudrait contrer. Les
amener à se rapprocher, pour les avoir ensemble à portée de feu. Même si on
attaquait les deux premières
canonnières, si la troisième reste en arrière, hors d'atteinte, elle demeure
maître de la situation, avec son canon.
Howard donnait ses ordres.
- Faites-moi venir le Piat. Qui l'a en ce moment? Thornton ou Godbold
?
- Godbold, Major.
- Bien. Faites-moi venir Godbold.
- Je suis là, Major.
Le caporal Godbold commandait la deuxième section, en lieu et place du
lieutenant Wood.
- Vous disposez encore d'une roquette, Godbold?
- Une seule, major.
- Ca ira. Il faudra bien. Si vous ne vous sentez pas sûr de vous, demandez à
Thornton.
- C'est le tour du caporal, fit Thornton qui était justement là. D'abord, c'est
son Piat.
- Thornton, Godbold, vous serez lieutenants. A vos postes. Godbold prenez le
Piat et postez-vous là, à droite
Howard indiquait l'endroit, un peu en aval de l'ancien nid de mitrailleuse.
Howard, au milieu du danger, est merveilleux. Précis, net, chic avec les hommes.
Finis les états d'âme pénibles des pauses-café.
- Yes, Sir.
- Bien, Tappenden, (Corporal
Tappenden, "D" Company Headquarters, Wireless Operator)
mettez-moi en communication-radio avec le colonel Coffin
.
Tout se précipitait. Le caporal Godbold
prit position sur la rive est avec son
Piat. Les paras du 7e bataillon se glissèrent dans les herbes de la rive ouest,
avec des Brens.
Les trois bâtiments allemands approchaient. Ils arboraient ostensiblement la
croix gammée, à l'arrière
. Des
officiers, en képi et ciré sombres étaient sur le pont du premier, et
observaient les rives.
Howard était de plus en plus convaincu, à mesure que les navires approchaient,
que leur commandement ne savait pas que le pont était tombé aux mains des
Anglais. Ils approchaient trop, et même s'ils avançaient très lentement, ils ne
faisaient pas signe de modifier leur allure. Ce
n'était donc pas la contre-attaque prévue, mais à la moindre fausse manœuvre,
tout pouvait dégénérer. Howard avait
pour l'instant l'avantage.
Il décida de tendre un piège. A la guerre comme à la guerre. Il fit chercher le
pontier, qui s'était réfugié chez lui (il habitait une petite maison en bordure
du canal), et lui ordonna de faire semblant de lever son pont, comme il avait
l'habitude, mais doucement, très doucement. Ce
qu'il fit.
Il y eut alors une réaction allemande, qui confirma Howard dans sa tactique ; le
premier bâtiment, remis en confiance par le mouvement du pont, accéléra ses
moteurs. Il y eut un bouillonnement à
l'arrière.
- Doucement, très doucement le pont, dit Howard, qui ne voulait pas non plus que
la distance augmente entre les trois bâtiments.
Le calcul devenait savant. Il ne fallait ni arrêter ni ralentir la marche du
premier bâtiment, lever juste assez le pont pour lui donner confiance tout en
gardant la possibilité de lui barrer
la route au dernier moment, et laisser se rapprocher lentement les deux autres
pour les avoir ensemble sous les tirs des Brens.
Le mécanisme du pont continuait de faire doucement son bruit caractéristique,
comme un long gémissement métallique d'une ferraille qui peine. Le tablier se
levait, doucement. Tout se passait comme Howard l'avait prévu.
La première canonnière ralentit, mais avançait en confiance grâce à cette
opération familière. On distinguait le visage des hommes au képi, à l'avant, qui
scrutaient les rives. Ils avaient
encore quelques secondes à vivre. Le
caporal Godbold avait mis en place son engin de mort.
Il laissait venir, venir... Il devait calculer le moment où le bâtiment allemand
serait exactement à sa portée tout en laissant le plus possible les deux autres
s'approcher.
Les Anglais, de part et d'autre du canal, étaient invisibles.
Peut-être les Allemands remarquèrent-ils quelques frémissements dans les herbes?
Le vent souillait encore, irrégulièrement. Furent-ils surpris de trouver le pont
désert, et de ne pas y voir les
sentinelles? Godbold ne leur
laisserait pas trop le temps de se poser de questions.
Les trois bâtiments étaient maintenant ensemble, parfaitement à portée. Dans une
seconde, il serait trop tard.
- Qu'est-ce qu'il fabrique? commençait à dire Howard.
Godbold visait. Il appuya lentement le doigt sur la détente, répétant
mentalement le déclic, prévoyant le choc de recul. Le coup partit.
Le bateau allemand explosa littéralement. La roquette avait pénétré juste dans
la chambre des machines. Les hommes furent déchiquetés, projetés, noyés. Ceux
qui pensaient pouvoir échapper tombaient sous le mitraillage croisé des Brens.
Presque aussitôt, les réserves de carburant firent une nouvelle explosion,
enflammant les blessés, achevant les mourants. Une
grande tache rouge souillait l'aurore.
La première canonnière coula immédiatement, corps et biens. Il n'y eut aucun
survivant. Dure est la guerre.
Le deuxième bâtiment, pris sous le feu du 7e bataillon des paras et des hommes
de Howard, tenta de faire demi-tour: trop tard. Le piège avait joué à plein. On
entendait des hurlements. Les rafales
balayaient le pont, ne laissant de chance à personne. Les Allemands qui
croyaient pouvoir se cacher n'échappaient pas au tir de l'une ou l'autre rive.
Le navire fut finalement immobilisé par un dernier tir qui fit exploser le
réservoir de carburant, et il vint s'échouer sur la rive droite, du côté de
l'actuel petit restaurant «La Péniche », (190
m en aval du pont) les hommes qui survivaient furent
faits prisonniers. Le capitaine était un jeune militaire aux yeux bleus, qui
paraissait très nerveux. Il ne voulait pas quitter son navire.
Il fallut l'extirper de force. Quand il fut sur la passerelle, Howard
l'attendait.
- Je peux téléphoner? fit-il.
Le troisième bâtiment réussit son demi-tour et mit les gaz. Mais où aller? Il ne
pouvait retourner vers Ouistreham, où il risquait d'être intercepté. Les
Allemands préférèrent s'échouer à
mi-distance entre Bénouville et Ouistreham, où ils resteront une dizaine de
jours, cachés dans les marais et les carrières, avant de finalement se rendre,
privés de nourriture, ou dégoûtés des
coquillages.
About an hour later, Major-General Gale , accompanied by Brigadiers Poett and Kindersley , approached the bridges from the direction of Ranville and, in spite of the sniping all around the area, casually strolled over, offering words of congratulation. Shortly after, two gunboats approached Bénouville Bridge from the direction of Ouistreham, and the leading boat proceeded to fire on the bridge, to no effect, with its 20mm gun. Once within range, men of the 7th Battalion opened up with small arms and one of Howard's men scored a direct hit in the wheelhouse with a PIAT bomb, causing the craft to turn sharply and collide with the bank. The crew hastily surrendered but the Captain was in need of some persuasion to do likewise. Howard said that he was "an eighteen - or nineteen-year old Nazi, very tall, spoke good English. He was ranting on in English about what a stupid thing it was for us to think of invading the Continent, and when his Führer got to hear about it that we would be driven back into the sea, and making the most insulting remarks, and I had the greatest difficulty stopping my chaps from getting hold and lynching that bastard on the spot." Howard had him escorted to the POW cage in Ranville for interrogation, "and he had to be gagged and frog-marched because he was so truculent and shouting away all through the time."
11- Le point de vue allemand. Source: page 270 de ce livre du Vizeadmiral Friedrich Oskar Ruge représentant la Kriegsmarine au Heeresgruppe B.
Le 12 juillet 1944 le Vizeadmiral Friedrich Oskar Ruge est à Paris au Marinegruppenkommandos West, il consulte des journaux de marche:
"Je lis les rapports de trois bâtiments d’escorte qui se trouvaient en réparation dans un chantier en aval de Caen. Le jour même du débarquement, ils sont descendus jusqu'au pont de Bénouville, sur l'Orne, mais ont fait demi-tour en constatant qu'il était occupé par les Anglais. Ce pont avait une importance capitale pour le ravitaillement de la tête de pont à l'est de l'Orne, car il constituait l'unique liaison avec les plages de débarquement. Les bâtiments auraient pu le détruire en s'engageant à fond, mais ils n'étaient pas au courant de la situation générale.
Ils essayèrent, sans succès, d'y retourner, et une tentative pour le faire sauter, entreprise avec des hommes de leurs équipages et des sapeurs, échoua également. Les marins atteignirent bien le pont mais les seconds, qui portaient les explosifs, avaient perdu leur contact. Nouvel exemple de collaboration insuffisante entre les armes."
De tous ces récits, il ressort qu'il y eut deux attaques: une venant de Caen certainement le VP212 et une attaque avec un, deux ou trois "gunboats" venant d'Ouistreham. Tous ces bateaux étaint-ils des VP ? La V-Flottille la plus proche était la 15.Vorpostenboot-Flottille (KKpt Viktor Rall) dont le PC était au Havre. Les VP conduisaient sans cesse des patrouilles et escortaient des convois côtiers.
Par contre à Ouistreham, il y avait la 10. Räumboots-Flotille, Kdr : Kapitänleutnant Herbert Nau avec au 5 juin 44, les navires suivants : Von der Lippe (M-546) et R-175 à 184, 190, 213, 214, 217-219, 221, 222, 224, et R-234. Les R-Boote de cette flottille pouvaient aussi bien naviguer jusqu’au Havre ou Cherbourg. Ont-ils participé à l'attaque de Pegasus bridge ?
Selon ce site le R 221 a sombré le 6 juin à Blainville sur Orne suite à une attaque aérienne.
R 221 sinkt bei einem Luftangriff auf Blainville
Même information ici le R-221
6 June 1944
The R-boat R221 is sunk after being attacked by Allied aircraft, at Blainville.
Position 49° 04N 01° 35W.
La position est erronée, elle correspond à Blainville sur Mer dans la Manche et non à Blainville sur Orne dans le Calvados.
La 10. Räumboots-Flotille dépendait de la 2.Sicherungs-Division, KzS Max Freymadl, PC au château de Souverain-Moulin près de Boulogne sur Mer.
Le journal de cette unité indique pour le 6 juin une communication radio avec le R221 qui était au chantier naval de Blainville sur Orne pour réparations: le pont de Bénouville est occupé par les Anglais, deux planeurs posés et qu'il se retire après combat.
Reinhart Ostertag dans Deutsche Minensucher: 80 Jahre Seeminenabwehr précise même que le navire a été sabordé par son équipage (selbstversenkt) !
Différence entre un Räumboot et un Vorpostenboot.
On peut noter également que la Hafenschutzflottille Cherbourg signale avoir perdu au moins 6 navires à Ouistreham et 7 autres à Caen le 6 juin.
Source:
Eléments repris dans un article de Stéphane Jacquet "De la Normandie à la Baltique avec la 30 Assaut Unit" paru dans le N°302 de 39-45 Magazine.
Remerciements:
A Philippe Bauduin, à Klaus Günther von Martinez, à Claude Demeester, à Blue spader, à Emmanuel Férey, à Jacques Ravelli et à Prosper Vandenbroucke et aux membres de ce forum.