Article d'Ouest-Eclair du 15 mars 1941

8 jeunes militants communistes sur la sellette.

Le Tribunal a eu à connaître hier d'une affaire de propagande communiste dans laquelle étaient impliqués huit jeunes gens; arrêtés par la police municipale de Caen, à la fin du mois de janvier 1941 à la suite d'une minutieuse enquête.

Il s'agissait de:

-  Pierre Rouxel, 19 ans en 1940, étudiant en chimie - Organisation : Front national - Domicile : rue Neuve-Saint-Jean à Caen


 - Serge Greffet, 18 ans en 1940, lycéen - Organisation : Front national - Domicile : rue Neuve-Saint-Jean à Caen

- Pierre Chardine, 21 ans en 1940, commis des P. T. T. - Organisation : Front national - Domicile :19 rue de l'Oratoire à Caen

- Raymond Guillard, 24 ans, comptable, 74 rue de Falaise à Caen

- André Montagne , 18 ans, électricien, 15 place de l'Ancienne-Comédie à Caen

 - Joseph Besnier, cordonnier à Mondeville 

- René Plantagenest, 37 ans, marchand forain à Caen

-  et Francis Le Monnier, 19 ans, demeurant au Petit-Quevilly, ces deux derniers actuellement en fuite.

A l’information, comme à l'audience, les inculpés reconnaissent la matérialité des faits, tout en précisant qu'ils ont subi l’influence de Le Monnier et René Plantagenest.

LE RÉQUISITOIRE

M. John Morgan, substitut du procureur de la République, dans un réquisitoire minutieux et ferme déclare, tout d'abord, ne pas vouloir donner à cette affaire une importance, extraordinaire.

Il s'attache ensuite, à étudier la culpabilité de chacun des inculpés: Plantagenest et Le Monnier, actuellement en fuite, qui sont les deux principaux coupables et contre eux. M. le Substitut réclame des peines de trois à cinq années de prison.

Contre les autres. il demande au Tribunal de prononcer des peines de six mois à un an de prison.

LES PLAIDOIRIES

Me Boitel, qui assure la défense de Chardine, Guillard et Besnier, soulève tout d'abord un point de droit important, à savoir que le décret en vertu duquel les inculpés sont poursuivies n'est pas valable puisque n'avant pas été ratifié par les Chambres avant le 31 décembre 1939. Et, se basant sur ce fait et aussi sur celui qu'on ne peut reprocher à des jeunes gens de ne pas avoir subitement changé d'idéal, le défenseur demande au tribunal la relaxe de ses clients.

M. Morgan répond à Me Boitel et, texte en mains, précise que le décret visé a été déposé, pour ratification, sur le bureau de la Chambre, le 22 décembre 1939.

A son tour. Me Tréhet adopte la thèse de son confrère et, avant critiqué la validité du décret en question,  présente la défense de Montagne et Rouxel, jeunes gens particulièrement  sérieux et intéressants sur lesquels les meilleurs renseignements sont fournis. Il demande pour eux une simple peine de principe.

Enfin. M. Préel, défenseur de Greffet, après avoir fait siennes les thèses de ses confrères, insiste sur le passé de ce jeune homme particulièrement bien noté au lycée et il demande au tribunal de ne prononcer qu'une peine avec sursis.

LE JUGEMENT

Après une demi-heure de délibération, le tribunal rend son Jugement dans cette affaire :

Le Monnier et René Plantagenest sont condamnés par défaut à chacun trois ans de prison, 1.000 francs d'amende et la déchéance de leurs droits.

Chardine et Montagne, chacun à huit mois de prison.

Rouxel,  Greffet et Guillard à six mois de prison.

Besnier à quatre mois de prison