Témoignage paru dans ce livre
Dans un livre de souvenirs, qu'il a intitulé, modestement, « Un Demi Siècle de Vie Caennaise »,
Max Maurin
(
Que de scènes poignantes auxquelles j'ai dû assister, étant Délégué régional à la Famille ! avec mon équipe Xavier de Maistre, avec Mlle Beaudoin et d'autres pour aider M. Leroyer à retrouver les blessés que cherchaient les malheureuses familles.
En effet, par suite des bombardements, il fallait continuellement évacuer les blessés d'une salle dans une autre, sans perdre leur trace (et il en passa près de trois mille !). A l'entrée, où j'en vis arriver, une fois, soixante-seize d'un coup, je faisais un « simili premier examen d'urgence » pour orientation, soit vers la pièce où on « réchauffait » les exsangues, ou bien immédiatement vers la salle d'opération, ou vers la pièce des pansements.
Le dépôt mortuaire ayant été incendié, il fallut enterrer deux-cent-cinquante personnes dans des sacs en « papier huilé ». Plus de cercueils !Plus de pompes funèbres !Il y eut jusqu'à cinquante cadavres dans une salle !... et les familles arrivaient en larmes :« Où est mon mari ? ma femme ? mon enfant ? ».
Une fois, je vis arriver comme deux fous, deux officiers Allemands en armes. Je leur dis de déposer leurs armes en vertu de la Convention de La Haye. Habituellement, je réussissais, mais là, rien à faire. Ils cherchaient un nommé Langlois. Celui-ci venait d'arriver blessé. Devinant leur dessein, je leur dis que je ne l'avais pas vu à l'entrée... qu'ils devaient aller au Lycée ! Mais ils passèrent outre. Vite je galopai prévenir tout le monde, pour qu'on ne dise pas où il était. Hélas ! un imbécile, non prévenu, leur dit : « il est à la salle d'opération », et j'entendis tout à coup, une rafale de balles de revolver... Ils l'avaient tué sur sa civière à la sortie de la salle d'opération.
Que dire aussi de l'émotion que je ressentais tous les jours en allant distribuer les friandises que j'avais pu recueillir, pour les deux-cent-cinquante petits enfants blessés !... La Maternité était installée dans les caves du Bon Sauveur et ce n'était point sans être très émouvant également ».
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Le 9 juillet
Un char Allié passe devant ma porte, rue Saint-Martin, où je suis réfugié :
« Where is the River Orne ? »,
me demande le chef du tank.
« Je vais vous piloter »,
lui répondis-je. Je
monte sur un char. Nous descendons le boulevard Bertrand. Ce que je n'avais pas
prévu, c'est que, dans les ruines du Théâtre, était posté un groupe de
mitrailleurs ennemis. Le tir commence. Les soldats anglais ferment le capot du
char, ripostent et font demi-tour. Je saute à terre et de toute la vitesse de
mes jambes, je me réfugie au hasard d'une porte béante, dans une cave où je
retrouve des Canadiens et M.
Hollier-Larousse, maire de
Louvigny et membre de la
Résistance. Je souffle un peu, car j'ai eu chaud. Puis, par des voies
détournées, je gagne le Lycée
Lire ici un témoignage plus complet de M. Max Maurin.