La COLLABORATION
Henri LÉON
Henri Léon, que ses collègues
surnommaient «le Dépendu
»,
est un enfant de l'Assistance publique, son père l'ayant
abandonné à sa naissance en 1922: à 14 ans, il est placé comme domestique dans
une ferme. Des petits larcins le mènent à trois reprises en prison jusqu'en 1941.
Membre du
M.S.R., il
aurait travaillé avec la Gestapo dès 1942 avant de rejoindre le
C.I.R. en 1943.
Rattrapé par le
S.T.O.
en 1943, il part
travailler en Allemagne. Revenu à l'occasion d'une permission, il ne veut pas
repartir. Mis en contact avec le
docteur Derrien
, qui anime un réseau de
résistance autour d'Argences,
il se cache dans une ferme à
Saint-Sylvain. En octobre 1943, il vole l'argent et
les effets d'un de ses camarades réfractaires. Mais, surtout, il dérobe une
petite boîte en fer-blanc appartenant à un résistant et contenant divers
documents du réseau, dont des fausses cartes d'identité, des cartes
d'alimentation, un cachet de mairie, des plans d'installations allemandes et des
cartes d'état-major. Quinze jours plus tard, Henri Léon réapparaît, et, avec
lui, la petite boîte en fer-blanc et son contenu. Entre-temps,
un résistant avait
intercepté une lettre d'André Vail, trafiquant de marché noir lié à la Gestapo,
destinée à un certain Sébire, réfractaire et ami de Léon.
Le groupe de résistants de Saint-Sylvain est alors convaincu que Sébire et Léon travaillent pour la Gestapo. Tous deux sont arrêtés, mais Léon réussit à s'enfuir. Quelques jours plus tard, il est repris au Mans, où il se cachait. Ramené à Rouvres, il est enfermé avec Sébire. Tous deux sont jugés par une dizaine de résistants et condamnés à mort par pendaison. Sébire est le premier exécuté, puis vient le tour de Léon, qui a la chance que sa corde casse: il est alors gracié et même remis en liberté! Ne voulant pas retourner en Allemagne à l'issue de sa permission, Léon avait été arrêté par les Allemands qui lui avaient proposé le marché suivant: ou le retour en Allemagne, ou un travail d'indicateur pour la Gestapo. Léon avait opté pour la seconde proposition. À la fin du mois d'avril, il était réapparu à Ouilly-le-Tesson « habillé comme un prince », prétextant vouloir rembourser ce qu'il devait à ceux qu'il avait volés. Le résistant qui le recevait tenta d'aller prévenir ses amis du retour de Léon, mais, lorsqu'ils revinrent, il avait disparu.
Léon revint le 2 juin 1944 avec ses
acolytes allemands du
SD
et français de la
bande à Hervé. De maison en maison et
de
village en village, Léon désignait sans aucune hésitation ceux qui appartenaient
au réseau du docteur Derrien: en quelques
heures, treize résistants, dont le responsable du réseau,
étaient arrêtés. Ils
furent emmenés à bord de Traction noires au siège de la
Gestapo de Caen où ils
furent frappés et torturés.
Transférés à la maison d'arrêt de Caen, ils feront partie des fusillés du 6 juin. La mission d'infiltration de Léon avait réussi: ce réfractaire réfugié était en fait un indicateur qui avait eu le temps de repérer la plupart des membres du réseau.
Après le débarquement du 6 juin,
Henri Léon passe au service du SD
d'Alençon. Blessé par deux fois lors
d'expéditions
contre le maquis ornais, il est transporté à l'hôpital militaire allemand de
Sées (installé dans le grand séminaire) le 5 août.
Ensuite, il suit les Allemands et disparaît. Selon Bernard Jardin
,
le responsable des
auxiliaires français dans l'Orne, Léon est
arrivé vers le 8 juin à Alençon, où il a participé à différentes expéditions.
Louis Bablin, membre de la Gestapo ornaise, l'a vu
armé d'un revolver à barillet et précise que celle-ci lui aurait remis une somme
de 20 000 francs, ce qu'ont confirmé deux
autres auxiliaires de l'officine allemande, Émile Chapron et William Poupard.
Dans sa fuite, Léon est vu pour la dernière
fois à Saint-Quentin. Sa trace n'a jamais été retrouvée.
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