La COLLABORATION

 

SOURCES: Collection Résistance et Mémoire

 

Serge FORTIER  (1921-1946)

                                                           

Fils d'un garagiste du boulevard Lyautey à Caen, Serge Fortier est né le 21 octobre 1921 et exerce la profession d'ouvrier mécanicien. Le jeune homme est un chrétien fervent élevé dans un milieu catholique contre-révolutionnaire et réactionnaire.

 

A la fin de l'année 1941, il adhère au RNP. En 1942, il fait la connaissance de Raoul Hervé qui lui conseille d'adhérer à un parti plus musclé, le PPF. Il noue alors des relations avec quelques énergumènes tels Joseph Martine, de Vieux-Fumé. En août 1943, les deux jeunes gens, et quelques militants du PPF dont Jean Laronche , mènent une action de commando à Livarot, peinturlurant les murs et la chaussée d'inscriptions diverses telles " PPF vaincra" ou " Mort aux Soviets ". Le lendemain, revêtus de l'uniforme du PPF, ils pénètrent dans la mairie pour détruire le buste de Marianne.

 

En septembre 1943, il franchit le point de non-retour et entre au CIR sur proposition d'Hervé. Il y entraîne ses camarades Joseph Martine et Jean Laronche.

 

Serge Fortier est un garçon frêle, taciturne, qui n'attire pas beaucoup l'attention, atout redoutable dans sa nouvelle mission : la chasse aux réfractaires au STO et aux résistants. Avec d'autres membres de la bande, il se fait passer pour un réfractaire ou un jeune résistant et recueille des renseignements transmis à la Gestapo. Avec cette méthode, l'OCM-CDLR est démembrée en décembre 1943.

 

A l'arrivée de "Bernard " en février 1944, la bande à Hervé prend une toute autre ampleur. Comme ses acolytes, Serge Fortier sombre dans le meurtre et la violence. Il devient membre du groupe Action du CIR et pourchasse sans relâche les résistants. Il participe à l'anéantissement des réseaux Alliance et Zéro-France. On le retrouve lors des arrestations à Montchamp, où il s'était fait passer pour un résistant Manchois. Il est de nouveau impliqué dans l'action contre le groupe du Front National de la gare de Caen ou dans la destruction du groupe du docteur Derrien d'Argences. Le 6 juin 1944, il se replie avec les autres membres de la bande à Falaise puis à Condé-sur-Sarthe. Mais, il n'a aucune intention de s'éterniser en Normandie. Il accompagne Raoul Hervé et André Martin à Paris. Il se sépare de ses compagnons le 2 juillet, sentant le vent tourner. Il se rend à Villedieu-lès-Bailleuls dans l'Orne pour chercher sa femme puis retourne à Paris. En route, il est victime d'une attaque de péritonite. Il passe une paisible convalescence alors que les premiers avis de recherche sont lancés. Revenu à Paris, il s'évanouit dans la nature. Le 6 décembre 1944, il est interpellé près de Meaux alors qu'il se rend à la messe. Son allure suspecte avait incité les gendarmes à le contrôler.

Son procès que la presse appelle le "procès des gestapaches" s'ouvre le 11 janvier 1946 devant la cour de justice de Caen, en compagnie de quatre autres membres de la bande à Hervé : Serge Fortier, Bernard Desloges, Jacques Brottot et André Martin.

 Les débats sont dirigés par le juge Sébire. Le chef d'accusation est des plus graves. La bande à Hervé est responsable de l'arrestation de près de 150 personnes qui ont été torturées, fusillées ou déportées.

Les prévenus minimisent leur responsabilité et la rejette sur les absents. Se succède alors, pendant deux jours,  le défilé émouvant des témoins : déportés, familles, victimes de sévices. Les accusés n'affichent aucune émotion. Le journal Liberté de Normandie commente :

"Ils ne paraissent pas fatigués par l'audience de la veille. Sur leurs visages, nulle trace d'insomnie. On demeure confondu devant 1e cynisme et l'insouciance de ces jeunes hommes qui ont l'air plutôt d'étudiants en goguette que d'authentiques criminels. Jacques Brottot affiche toujours le même détachement des choses de ce monde. Daniel Collard s'entretient fréquemment avec son avocat et semble trouver sa cause excellente. Desloges, plus lourdaud, à l'air  gêné aux entournures et Fortier fait de plus en plus chef de bande. "

Liberté de Normandie du 10 mars 1946

Les plaidoiries des avocats comme les témoins à décharge ne peuvent infléchir l'opinion des jurés. Le 14 mars 1946, après une courte délibération, le verdict tombe.

Serge Fotier, Daniel Collard et Bernard Desloges sont condamnés à la peine capitale, à la grande joie de l'assistance.

 André Martin et Jacques Brottot sont condamnés à vingt ans de travaux forcés.

Le 9 mai 1946, Daniel Collard, Bernard Desloges et Serge Fortier sont fusillés à l'aube dans la cour de la prison.

Liberté de Normandie du 10 mai 1946

 

Sources:

Cédric Nevau.

et

RETOUR COLLABORATION